Antoine Leclerc se dévoile de ses débuts à ses rêves de pilote

Cette semaine, je vous propose une interview du pilote pro Antoine Leclerc. Mais d’abord, un peu de contexte ! Il y a quelques semaines, j’ai eu le plaisir de me rendre sur le circuit Paul Ricard pour assister au Fanatec GT World Challenge Europe. Mais si tout le monde (enfin… chez les passionnés de sport auto) connait le GT World Challenge entre autres grâce à Assetto Corsa Competizione qui en est le jeu officiel. Moins nombreux sont ceux qui savent qu’il y a en réalité une tonne d’autres courses autour de ces meetings.

Lamborghini Super Trofeo, McLaren Trophy Europe, GT4 European Series, GT4 Scandinavia, GT1 Sport Club et même du SimRacing avec le SRO eSport SIM Pro Series. Ces week ends sont donc l’occasion de s’en mettre littéralement plein les yeux et plein les oreilles.

Et parmi tout le fourmillement de spectateurs, de mécaniciens et de pilotes, c’est du côté de Code Racing Development et du pilote Antoine Leclerc que j’ai choisi de m’attarder. Je pense que vous comprendrez vite pourquoi en lisant l’interview, alors je vous laisse tranquille pour rencontrer Antoine comme il se doit.

Bonjour Antoine Leclerc, pourrais-tu te présenter brièvement ?

Antoine Leclerc, pilote GT4 ambassadeur Alpine

Antoine Leclerc, pilote automobile professionnel. Je suis là aujourd’hui dans le championnat GT4 European Series puisque je suis pilote Alpine et ambassadeur de la marque. C’est ma troisième saison dans ce championnat et la deuxième avec Code Racing Dévelopment. Ce Week-end on est au circuit Paul Ricard pour la deuxième manche de ce championnat.

Tu pourrais nous raconter ton cheminement de carrière ?

Alors j’ai commencé en karting, j’ai toujours voulu être pilote de course. Depuis tout petit c’était vraiment une obsession chez moi. Mon premier souvenir c’est du karting, du Kart de loc. Et ensuite de la monoplace. Très vite du GT, parce que j’avais pas des partenaires et des moyens qui me permettaient d’évoluer à plus haut niveau en monoplace. Et comme je voulais vraiment en faire mon métier j’ai dit « OK il va falloir se poser réfléchir ».

J’ai eu la chance de rencontrer Philippe Alliot qui m’a dit « Si t’as pas les moyens pour faire de la
monoplace à plus haut niveau ça sert à rien de continuer. Viens chez en GT et viens essayer ce que
c’est qu’une qu’une grosse voiture de course avec des portières ! »

Alors au début forcément quand on est jeune c’est la F1, la F1, la F1. Et le GT je l’avais vraiment jamais regardé. Je suis allé faire une course à Bahreïn, ça m’a plu, et c’est comme ça que ma carrière est partie en
GT. J’ai été champion de France en 2008 . Ca a lancé ma carrière au niveau international. J’ai été ensuite pilote Art Grand Prix McLaren. Bentley en tant que Bentley Boy. Donc j’ai fait la majeure partie de ma carrière en Grand Tourisme.

C’est quoi ton tout premier souvenir en lien avec le sport auto ?

Alors c’est pas de la course, c’est quand j’étais tout petit sur un train électrique que j’avais demandé à mes parents. Au début il était sur des rails en 8 et puis très vite j’ai enlevé les rails en fait je faisais mon circuit dans le salon avec mon train électrique. Et après plus plus on va dire plus sérieusement c’est en karting le jour où j’ai réussi à convaincre mes parents et mon père de me mettre les fesses dans un baquet de kart.

En Kart de loc et une fois que j’y ai goûté c’était tous les soirs dès que je sortais du collège je fonçais à la piste de Kart indoor et je faisais des tours et les tours. Et comme j’étais léger et que les temps étaient plutôt bon, tous les mecs qui venaient rouler en fait – comme c’est moi qui avais le record de la piste – ils voulaient me battre. Donc ils payaient pour que je roule avec eux la session d’après. Et c’est comme ça que je faisais deux heures de karting de loc sans que ça me coûte 1 euro ! Enfin c’était en franc à l’époque, c’était en 95-96.

Tu étais fan de F1 mais aujourd’hui quelle catégorie ressort vraiment pour toi ?

La F1 ! Mon enfance c’est Prost/Senna. J’étais pro-McLaren, j’étais peut-être un peu plus pro-Senna parce que il y avait ce panache qu’avait Ayrton en qualification et cette hargne qu’il avait en course. Mais j’admirais aussi Alain Prost qui avait une science de la course et du réglage de sa voiture exceptionnelle.

Après, Le Mans ! Les 24 Heures du Mans ça c’est sûr. C’est aujourd’hui la dernière case que je souhaiterais
cocher avant la fin de ma carrière.
J’ai été Champion de France, j’ai été pilote d’usine. Mais je n’ai jamais participé aux 24 Heures du Mans. J’ai jamais eu l’opportunité ça s’est jamais bien goupillé. Donc c’est vraiment quelque chose que que je voudrais concrétiser.

Donc oui, c’est la F1 parce que ça fait rêver tout le monde et puis c’est Le Mans. Cette année il y a une magnifique édition pour le centenaire avec le retour de beaucoup de constructeurs en catégorie reine. Donc le Mans et cette course de 24 heures qui est juste incroyable. Je l’ai déjà vécu parfois en tant que spectateur… Alors en privilégié dans les box etc. Mais j’aimerais un jour le vivre en tant que pilote.

A découvrir : Notre rencontre avec Gustavo Menezes, pilote Peugeot 9X8 au 24h du Mans 2023

Question plus spécifique : c’est quoi le ressenti que tu veux dans une pédale de frein ?

le pédalier de l'Alpine GT4
Un petit tour sur le frein de l’Alpine GT4

Alors une bonne pédale de frein, c’est une pédale qui a de la consistance, qui ne s’allonge pas et qui est
toujours qui est constante voilà. Qui est consistante et constante. Moi c’est ça qui me plaît et ça permet si tu veux, à partir de là, de pouvoir freiner comme on le souhaite avec la bonne pression le bon dégressif etc.

Quelle force tu dois mettre sur le frein de la GT4 ?

Là en GT4 on est plutôt autour de 80-85 bars maximum. Dans des plus grosses autos comme les GT3 on va monter jusqu’à 120 bars sur les très gros freinages. C’est vraiment de la force qu’on met uniquement avec avec la puissance musculaire de la jambe gauche et du pied gauche. Puisque on freine beaucoup au pied
gauche dans ces voitures là.

Au niveau de la course de la pédale, tu préfères plutôt courte ou longue ?

Assez courte quand même ! Avec de la consistance, c’est ce que je te disais. Avec pas trop de longueur de pédale. Moi je préfère des pédales assez consistantes qui permettent d’avoir… En tout cas qui me permettent d’avoir un bon feeling avec et pouvoir reproduire la même chose à tous les tours.

Est-ce que tu utilises le SimRacing ou les Simulateurs Pros ?

Oui, c’est quelque chose qu’on utilise. C’est un outil qui permet de me préparer pour les meetings pour répéter les notes. D’une année sur l’autre les choses changent. Donc ça permet, même si on connaît
très bien un circuit, de se remémorer certaines choses. Des choses qu’on a pu mettre en place sur le meeting précédent. Et quand on revient sur le circuit du coup on travaille dans le SimRacing de façon à gagner un petit peu de temps après sur sur la piste le jour J.

Pour toi il y a vraiment des choses à en tirer en tant que pilote ?

Bien sûr et puis je fais beaucoup de coaching, d’accompagnement à la fois de jeunes pilotes junior et de Gentlemen Drivers. Et on l’utilise aussi pour ça, pour gagner du temps et préparer ses pilotes là en amont au meeting de façon à leur faire gagner du temps.

En GT4 on est deux pilotes, en GT3 c’est 3. Pour avoir fait du Pro-Am l’année dernière en GT3 aux 24h de Spa c’est même quatre pilotes. Donc le temps de roulage il est très court quand on le divise par quatre ! Donc arriver préparé en ayant calé des choses ça permet de gagner du temps et d’être plus efficient sur les séances d’essai.

Quelles limitations tu ressens encore entre le SimRacing et la réalité ?

Oui forcément. En sim, il n’y a pas entre guillemets la barrière psychologique. Si je prends un virage comme le Raidillon, bon bah si dans le Raidillon on perd la voiture en sim c’est pas très grave. On finit le tour ou alors on fait on fait Reset et on recommence. Donc des fois c’est vrai que ça désinhibe certains pilotes qui passent à fond à tous les tours et qui ne prennent plus la même attention dans le Raidillon.

Quand c’est dans la vraie vie, le Raidillon c’est un challenge à tous les tours ! Je prends ce virage parce que beaucoup de gens connaissent. C’est vraiment un challenge à tous les tours ! Que ce soit en essai, en qualif, en course… Le Raidillon ça reste un challenge et c’est un virage où il faut être hyper hyper focus, concentré. Parce que là où on va soulager, là où on va braquer, ça va conditionner la sortie. Si on braque trop tôt on peut toucher le vibreur à l’intérieur et ça déstabilise la voiture. Et si on braque trop tard on rate la corde et ça peut aussi être préjudiciable sur la sortie du virage.

Ensuite on a un faux plat montant jusqu’à Combes. Ca c’est dans « le moins pire des cas », mais dans le pire des cas on peut perdre la voiture en touchant le vibreur à l’intérieur on braque en trop tard… Ce qu’on a ce qu’on oublie un peu en Sim Racing.

Les Tutos trajectoire :

J’en profite pour vous rappeler qu’on vous propose chaque semaine un Tuto Trajectoire réalisé par un Moniteur de piste réelle. L’occasion de connaitre précisément les points de repères à suivre pour passer le Raidillon 😉

Le Tuto Circuit Spa-Francorchamps

Quel conseil tu donnerais à un jeune qui voudrais se lancer dans le SimRacing ou en réel ?

Pour y faire carrière, en tout cas pour toucher pas seulement au sim mais aussi à la course réelle, le simulateur peut être une bonne école au départ. Parce que ça t’apprend quand même les circuits, les trajectoires. Et ensuite il faut faire du karting et avoir de gros soutiens financiers pour pouvoir évoluer. Parce qu’aujourd’hui c’est vrai que c’est la clé. Clairement il faut ces supports financiers qui permettent de progresser, d’évoluer dans les bonnes équipes. Et on le voit à tous les niveaux, et on le voit dès le karting !

Pour ensuite intégrer une filière qui permette d’avoir un soutien plus important. Mais au départ c’est la base. Quand on voit aujourd’hui les budgets qui sont dépensés pour faire du karting… Si on revient 25 ans en arrière, jamais je n’aurais pu faire du karting comme je l’ai fait si on avait été aux budgets qui sont aujourd’hui dépensés pour évoluer.

Même en parlant d’un niveau régional ou national sans parler international, il faut déjà des moyens qui sont très importants. Et si on veut jouer à armes égales avec la concurrence, malheureusement ça passe passe par là. Sinon on ne part pas sur un pied d’égalité. Et en compétition automobile c’est dur quand on est pas sur un pied d’égalité.

Tu as aussi de l’expérience en Rallye qu’est-ce que ça t’a apporté ?

J’ai participé à mon premier rallye il y a un an et demi maintenant. C’était le rallye Sainte Baume, un rallye circuit au volant d’une Alpine. Et j’ai adoré le format ! Déjà le partage avec le copilote et puis ensuite le fait de passer beaucoup de temps dans la voiture. On part le matin, on fait un choix de pneus pour la boucle qui arrive. C’est généralement trois spéciales. Et on alterne temps faible en liaison, temps fort en spéciale.

On rentre à l’assistante, on corrige les notes pour le deuxième tour on regarde de nouveau les vidéos. On partage avec l’équipes sur le choix de pneus. Les conditions peuvent changer donc il y a de nouveau un choix de pneus à faire pour trois spéciales.

C’est vraiment sympa, il y a une vraie réflexion à avoir ! Il faut savoir en perdre dans l’une pour en gagner plus dans l’autre. Donc tout ça, c’est c’est quelque chose qu’on a plus en circuit aujourd’hui. En circuit c’est Slick ou Pluie en tout cas dans les catégories en GT. Avec souvent du monotype donc avec un seul manufacturier.

Là c’est pas le cas en rallye. Et puis de passer beaucoup de temps dans la voiture il y a beaucoup moins d’attente qu’en circuit. On parle le matin, on rentre le midi, on repart en début d’après-midi on rentre le soir. Et donc on partage beaucoup avec la copilote sur des temps forts des temps faibles. Et ça c’est chouette, c’est quelque chose qui m’a beaucoup plu.

Ca m’a complètement changé de ce que je fais depuis 20 ans en circuit et j’ai adoré ! Donc on a remis ça au mois de décembre l’année dernière il y a 6 mois. Sur le même rallye qu’on a gagné cette fois, donc j’ai envie de continuer j’ai envie d’en refaire. Je serai au départ du Sainte Baume en 2023 de nouveau au volant de l’Alpine mais cette fois-ci en version rallye RGT. Et peut être plus si affinité.

OK, ça prend de plus en plus de place dans tes goûts et emploi du temps ?

Pas de plus en plus, parce que cette année on a regardé ce qu’on pouvait éventuellement faire en championnat de France. Et malheureusement il y a beaucoup de clashs de dates avec le programme en GT4 Europe plus les programmes sur lesquels je suis impliqué en tant que coach. Néanmoins c’est pas impossible qu’il y en ait un deuxième en plus du Sainte Baume qui est lui hors saison puisqu’il est au mois de décembre. Donc on y réfléchit c’est pas impossible.

Que peut-on te souhaiter pour les 12 mois à venir ?

Ecoute, l’objectif cette année clairement avec Code Racing development et Alpine c’est d’aller chercher le titre de Champion d’Europe. On a gagné des courses l’année dernière on en a déjà gagné cette année sur le premier meeting de la saison à Monza. On gagne les deux mais on prend une pénalité sur la première donc malheureusement on perd les points de la victoire, mais on gagne le lendemain. Voilà être régulier marquer des points être là tout le temps. Et puis on espère être là à la dernière à Barcelone pour la finale et se battre pour le titre.

Un grand merci à Antoine Leclerc !

Merci à Antoine pour le temps qu’il a accepté de nous consacrer. Quelques heures après cette interview, Antoine Leclerc et son coéquipier Loïc Villiger sont arrivés en seconde place dans la catégorie Pro-Am. Mais c’est la course du lendemain qui fût la plus impressionnante. Toujours au Castellet après un début de course canon, la pluie s’est invités sur le dernier tiers de l’a course l’épreuve. La plupart des voitures étant restées en pneus Slick, on a eu droit à un véritable festival de glisse. Mais surtout aussi à une masterclasse de pilotage de la part de nos deux comparses qui ont remporté l’épreuve dans leur catégorie dans des conditions apocalyptiques !

Je vous invite donc à suivre de près ces deux pilotes qui n’ont pas fini de nous surprendre sur cette saison 2023 du GT4 European Series.

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