Le PDG d’Asetek André Eriksen répond à toutes nos questions !

Pour la toute première fois, André Eriksen, créateur et PDG de Asetek accepte une interview pour un média francophone. Fatalement on est très fiers d’être les heureux élus. D’autant plus que dans cette interview, André va nous livrer quelques pépites et exclusivités dont il se gardait bien de parler jusque ici.

On vous laisse découvrir ça grâce à la vidéo qu’on a pu tourner sur place mais aussi la retranscription intégrale que vous retrouverez juste en dessous 😉

Bonjour André Eriksen, pouvez vous vous présenter et nous dire où nous sommes ?

Oui ! Je m’appelle André, je suis le fondateur de l’entreprise Asetek. On existe depuis plus de 20 ans maintenant. Là, nous sommes dans nos quartiers-généraux danois, à Aalborg dans le nord du Danemark. Et pour être plus précis nous sommes dans notre Race-shop où vous pouvez voir nos voitures de courses.

Pourquoi avoir choisi de diversifier vos activités dans le simracing il y a deux ans ?

Et bien, c’est une bonne question. En tant qu’entreprise, nous n’avons pas de passé dans d’héritage dans la course auto. On fait des refroidissements liquides pour ordinateurs de gaming. Mais on a passé ces 5 à 6 dernières années a chercher quelle serait la suite pour nous. Et il y avait deux chemins évidents face à nous.

Le premier, c’était de faire plus d’équipements pour gamers. Ou alors de trouver d’autres applications pour nos systèmes de refroidissement. Alors, on a creusé le sujet des voitures électriques, des lasers industriels, militaires, le matériel Hifi, projecteurs LCD, projecteurs DLP, toutes sortes de choses où le refroidissement liquide pouvait s’avérer utile.

Et ce qu’on a compris c’est que nous n’étions pas des experts dans la mise en place de solutions
dans ces secteurs, donc c’est difficile d’y entrer. Parce que le refroidissement liquide c’est pas comme une vis. C’est quelque chose fait sur mesure.

Et puis on a regardé de l’autre côté, les autres possibilités. Alors, est-ce qu’on part sur des chaises gaming, claviers, souris, casques, des choses de ce genre ? Mais… En fait, on aime secouer, on aime innover et comment innover dans ces secteurs ?

Voilà une première raison. La seconde c’est qu’on se retrouverait en compétition directe avec nos clients
et je ne pense pas que ce qoit une bonne idée de faire concurrence à nos clients. Donc ça n’avait pas vraiment de sens non plus ! Et puis…

Je ne sais pas si vous avez pu voir notre Académie E-Sports à l’étage ? C’est un projet de responsabilité sociale pour l’entreprise. Les enfants, les jeunes de la ville, du secteur autour peuvent venir et jouer gratuitement… Ils jouent surtout à Counter Strike.

On a les meilleurs équipements que l’argent peut offrir, fabriqués par nos clients, avec bien sur nos systèmes de refroidissement. Et les jeunes peuvent les utiliser. Et quand on a fait cette Académie E-Sports
J’ai pensé « Et si on mettait des simulateurs de conduite aussi ? »

Parce que peut être que tous les jeunes ne veulent pas jouer à des FPS. Peut être qu’il y en a qui préfèrent piloter à la place. Donc on a monté 5 simulateurs de course et il s’est avéré que c’est la raison principale de notre choix. Parce que, à aucun moment dans le temps nous n’avons réussi à faire tourner les 5 simulateurs en même temps !

Soit les pédales avaient un souci, ou alors c’était les palettes, ou encore des problèmes de logiciel, de driver, de firmware… Et parce que j’ai un passé dans la course, une expérience depuis de nombreuses années, j’ai construit des simulateurs moi-même pendant des années.

Alors j’ai pensé à tout ça et je me suis dit « Je pense qu’on peut faire mieux que ça, on peut faire ça mieux. » Meilleure qualité, meilleure intégration, simplicité d’utilisation… Parce que le simracing aujourd’hui c’est un marché qui parle bien aux passionnés qui adorent bricoler, faire des trous, assembler les choses
et qui aiment mettre les mains dans le logiciel. Mais il y a aussi beaucoup d’utilisateurs qui ne veulent pas faire ça.

Je dirais que l’expérience d’utilisateur qu’on a vécu avec 5 soi-disant haut de gamme nous a vraiment poussé là dedans. Et si on prend le temps d’y penser, maintenant vous avez fait le tour de l’entreprise, vous avez vu tous les ingénieurs qu’on a…

Ils sont très nombreux ! Et ils représentent toutes les spécialisations. On a la thermodynamique évidemment pour nos refroidissements liquides, mais on a aussi des spécialistes en mécanique, logiciel, hadware, low-level software… On a tout.

Et en y regardant de plus près, un simulateur auto c’est de la mécatronique. La mécatronique c’est quoi ? Hardware, software et mécanique. Et le fait qu’on ait déjà ces compétences en interne, c’est ce qui nous a décidé à entrer dans le marché simracing.

C’est une réponse longue mais il y a des raisons stratégiques qui ont dicté ce choix.

Pourriez-vous nous parler un peu de votre expérience en course ?

Oui. Quand j’étais enfant je faisais des courses de motocross et j’ai fait ça de nombreuses années
après j’ai eu d’autres centres d’intérêt, j’ai fondé Asetek et je n’ai pas fait de course pendant des années.

Et puis j’ai déménagé en 2007 au nord de la Californie et je m’y suis remis. Le climat était magnifique, j’habitais pile entre la piste de Sonoma et Laguna Seca. Laguna Seca était à 25 minutes de chez moi. On s’est bien amusé, il y avait beaucoup de belles pistes autour alors je me suis mis au Go-Kart. Le basique du basique, pas de boite de vitesse, rien de compliqué.

J’ai appris à piloter ça, je suis devenu champion de Californie en… Je ne me souviens plus… 2010 ou quelque chose comme ça. Puis je suis passé aux Karts avec boite. J’ai participé aux US Nationals
et quand j’ai fini ça je suis passé aux Formula.

Et, bien sûr je n’allais pas en faire une carrière, j’étais trop vieux, j’ai surement bien plus à gagner avec Asetek qu’avec les courses. Donc je suis passé aux Formula mais plutôt que de commencer avec les Formule 4 par exemple, j’ai commencé avec les Pro Formula Master qui se rapproche, je dirais, plus d’une Formule 3. Assez puissante et légère.

Donc j’ai fait ça pendant 3 ans et mon meilleur résultat c’est d’avoir fini 2ème du championnat. C’était pas mal ! On a voyagé sur plein de pistes américaines. Et puis pour les TrackDays et pour des courses isolées j’ai piloté toute sortes de voitures.

Mais ce qui est intéressant c’est que j’ai deux enfants. Sophia et Valdemar. Et ils s’étaient mis au Go-Kart eux aussi à l’âge de 7 ans. Donc quand on vivait en Californie on était 3 à piloter. La course c’était notre vie
Tu sais, nos amis et nos familles étaient au Danemark évidemment… En Europe, dans un fuseau horaire différent… On avait pas grand chose d’autre à faire que de travailler ou faire la course.

Donc on a vécu des week-ends, des semaines, des vacances entières dans notre camping car en famille à aller de circuits en circuits aux USA. Et puis on est revenus au Danemark, j’ai arrêté la course. Je fais juste du Go-Kart maintenant sur les pistes danoises et quelques pistes européennes.

Ma fille a arrêté aussi. Je dirais que c’est une chance pour des raisons financières ! Mais mon fils a continué. Donc on a fait Formule Ford, Formule 4, on avait deux F4 c’était les nôtres, on avait une équipe de F4. Et puis il a fait deux fois le MRF Challenge en Asie, ce sont des F3. Et puis il a fait le championnat de F4 espagnol. Puis après ça, encore pour des raisons financières, on ne pouvait plus se permettre de se placer en Formule 3 donc on est passé aux GT3.

Là, il en est à 2 saisons en GT3. Et l’année prochaine on va surement passer aux Le Mans Prototypes. Donc, je dirais que j’ai une expérience assez large avec tous type de véhicules de course. Et j’ai assisté à beaucoup de courses de Formule 1. Depuis qu’on sponsorise Kevin Magnussen, j’ai des accès là bas

Et au delà de ça je suis un gros passionné de bagnoles. J’ai quelques voitures moi-même et des amis qui ont pas mal de supercars. Donc je dirais que j’ai une expérience assez vaste avec tout type de véhicules de course ou non. Sans avoir jamais été un pilote professionnel bien entendu.

Vous avez pu faire tout ça en faisant progresser l’entreprise jusqu’à son entrée en bourse ?

Oui ! Tu sais, au Danemark en ce moment il y a le sujet de la balance vie privée / vie de travail, qui est très chaud. Mais j’ai une approche très différente depuis toujours.

Je n’ai qu’une vie. Je n’ai pas une vie au travail et une vie à la maison, tout est lié. Parce que quand j’ai fondé Asetek j’avais des clients aux USA, des clients en Australie, en Europe donc je ne suis jamais vraiment en pause. Mais tu pourrais me dire « OK du coup t’es jamais vraiment au boulot non plus » Mais je le suis !

Je peux travailler à peu près n’importe où. En plus des voitures, je fais des courses de chasse neige, de jet skis.. J’adore tout ce qui a un moteur ! On a une maison en Norvège par exemple, on va là bas et je m’amuse avec ma famille 2 ou 3 jours puis je travaille 2 ou 3 jours non stop et… tu vois, je ne me dis pas « Ok tu es en vacances 4 semaines ou 3 semaines pour m’apercevoir que j’ai 2.000 emails en rentrant.

Je préfère tenir le rythme tout le temps. Voilà comment j’ai fait. C’est peut être différent mais c’est comme ça que je fais et ça marche bien et avec ma famille ça marche bien aussi et grâce à la course on a passé beaucoup de très bon temps en famille. On a traversé les USA, on a couru à Dubaï, en Europe… On a voyagé partout ensemble en famille et c’est super.

Tu vois, par exemple, dans 2 jours, jeudi, Valdemar et moi on va à Barcelone. Il a une course du GT World Challenge Et bien sûr les deux premiers jours je serais à l’hôtel à faire mon travail. Lui va faire les essais, les qualifications etc. Et je le rejoindrais sur la piste samedi et dimanche, c’est du très bon temps en famille.

Pour revenir un peu à Asetek SimSports, comment vous vous positionnez dans l’univers concurrentiel qu’est le simracing ?

Je dirais que le marché de la simulation a pas mal changé depuis qu’on a décidé de s’y mettre il y a deux ans. Tu sais, on a quelques marques d’entrée de gamme qui sont arrivées avec des produits qui vus de l’extérieur on l’air d’être très bien. A des prix très abordables.

Je dirais que les problèmes qu’on avait sur les simulateurs qu’on avait construit (pour l’Académie E-Sports) pour certains ont été résolus. Certaines marques ont la même force que nous donc oui, la concurrence a changé. Mais je dirais que notre mantra, ce en quoi on croit et qui vient de notre expérience en refroidissements liquides c’est… alors bien sûr tu ne va jamais interviewé un PDG qui va te dire que ses produits sont mauvais…

Mais quand je dis qu’on fait de la qualité, ce que je veux dire c’est qu’on passe beaucoup de temps… Et tu as vu notre salle de tests, on passe énormément de ressources pour tester nos produits avant de les lancer sur le marché. Ca ne veut pas dire qu’on est parfaits et qu’on ne fait pas d’erreurs.

Mais on prend vraiment tout le côté expérience utilisateur et qualité des matériaux très au sérieux. Et ça, ça vient de notre secteur refroidissement. Parce que si on vend un système de refroidissement à 100$ à Dell
qu’ils le mettent dans un ordinateur à 5.000$ et qu’il fuite ! Alors Dell a un problème à 5.000$ et ça deviendra notre problème.

Donc… Vendre à ces entreprises, comme dans le monde automobile ça demande une qualité très très haute. voilà l’une des raisons. L’autre raison c’est, et je pense que ça se voit sur nos produits on met aussi le savoir faire en design industriel Danois à l’honneur. On essaie de faire des produits qui soient beaux, avec du style, et je mets un point d’honneur à ne pas copier les autres.

Alors, on est pas aveugles, une vis est une vis… Mais on a essayer de sortir quelque chose que personne d’autre n’avait fait avant et tu as vu les machines qu’on a sur place. Si on voulait, on aurait pu copier du matériel qui est déjà sur le marché et on aurait pu lancer les produits en quelques semaines. D’ailleurs c’est ce que font certains. Je ne juge pas si c’est bien ou pas, ce n’est pas ce qu’on fait.

Et parce qu’on fait des produits conçus et pensés pour une production de masse… Par exemple, si on regarde nos bras de pédales sur l’Invicta et sur le Forte ce sont les mêmes !

Si tu veux usiner un bras en aluminium CNC comme celui-là c’est 200$. Mais étant donné qu’on les moule c’est une fraction du prix. Et on peut mettre plus d’argent dans les machines parce que ça demande de sacrés investissements. Mais voilà pourquoi on peut les proposer à des prix abordables. Donc on passe par la production de masse, et je ne dirais pas qu’on est « pas chers » mais plutôt qu’on donne plus de valeur.

Si on regarde les pédaliers hydrauliques du marché par exemple ils sont 2 à 3 fois plus chers que nous
souvent ce sont des pédaliers de voitures qui ont été adapté avec d’autres pièces issues de l’industrie automobile. Et le prix est bien plus élevé et ce que je pense c’est que pour le résultat final nos produits sont pas chers.

Et puis on essaie vraiment de faire un bon service client et un bon support client. On va pas pousser aux extrêmes parce que j’ai vécu aux USA pendant des années et là bas c’est… Tu viens de France. Au Danemark on aime dire que les entreprises françaises haïssent leurs clients. Y’a un peu de vrai certainement ! Et on peut dire que les USA c’est l’opposé, le client a toujours raison. Je ne veux ni l’un ni l’autre.

Mais on essaie d’avoir un bon service client. Et je dirais que la somme de tout ça, c’est ce qui nous différentie. Si on regarde le pédalier Forte, le pédalier Load Cell. En regardant bien, c’est un pédalier Invicta
c’est juste qu’il a un Load Cell au lieu du cylindre hydraulique. Et en terme de prix je le trouve très compétitif

Pour rebondir sur l’Invicta et le Forte, est-ce que le développement s’est déroulé selon le plan ou est-ce que vous avez du gérer des problématiques particulières entre les deux ?

Je dirais que sur le développement on était surement 6-7 mois en retard avec l’Invicta. Personne ne l’a su puisque c’était notre premier produit mais ce cylindre de frein a l’air très simple de l’extérieur mais c’est une bonne idée, et ça représente bien notre façon de voir les choses et notre qualité.

Le pédalier Forte et son frein Load Cell

Même architecture mais cylindre hydraulique pour l’Invicta

Donc, j’avais pour idée que ces cylindres devaient tenir 1 million d’activations à 100 bars de pression. Si on y pense, c’est énorme ! C’est très largement au dessus d’une voiture de course. C’est même au dessus d’une voiture de route, c’est énorme comme attente. En plus dans une voiture de course on refait les cylindres de frein à chaque saison par mesure de sécurité.

Alors… On a fait un premier prototype et il a tenu il me semble 6 ou 700.000 activations, c’est pas mal ! On était content on a continuer d’avancer et on a voulu lancer la production… Ils ne tenaient jamais… Peu importe ce qu’on tentait, de nouveaux problèmes s’accumulaient en permanence.

Et je suis sûr que certaines entreprises auraient lancé leur produit bien plus tôt, mais on a refusé de lancer le modèle avant d’avoir atteint le standard de qualité qu’on voulait. Donc ça ne s’est pas passé exactement comme prévu, ça a été bien plus difficile à développer que j’aurais pu l’imaginer. C’était dur. Très dur.

Et avec le Forte, je dirais que c’était simple comme bonjour. Tu sais on voit les choses comme une « plateforme », c’est quelque chose que tu verras plus tard au fil des années. Même si tu achètes notre modèle le moins cher, tu seras capable de l’améliorer au fil du temps.

Pour les pédales, tu pourras prendre le pédalier le moins cher de notre marque mais tu seras toujours capable de l’améliorer pour en faire un Invicta. On pense à nos produits comme des « plateformes » et on savait ça déjà au lancement de l’Invicta. On savait que le Forte arrivait donc tout devait être identique,
il fallait juste développer un nouveau cylindre de frein. C’était très facile et rapide.

Et concernant le pédalier La Prima, une idée sur sa date de sortie ?

On a lancé cette idée quand Asetek est entré dans le marché du SimRacing, que Invicta serait le haut de gamme, Forte le milieu de gamme et puis les La Prima seraient nos entrées de gamme.

Mais c’est toujours plutôt haut de gamme comparé à certains concurrents, mais pour nous ça sera de l’entrée de gamme. L’idée était de lancer des produits pour cette fin d’année, ça pourrait arriver, peut être pas… On a été bousculés comme toute les entreprises que ce soit le simracing ou pas. On a du mal à recevoir les composants depuis la chine, que ce soit les puces électroniques…

Mais en plus, on a notre propre usine , nos propres bureaux en Chine et nos plus gros fournisseurs sont en chine et à cause du Covid ils se font fermer du jour au lendemain. D’un coup on ne peut plus recevoir tel truc. Par exemple, les cylindres de frein on posé problème récemment, notre fabriquant a été fermé d’un coup, on ne pouvait plus sortir le moindre produit. Donc tout a pris un peu de retard.

Notre base Direct Drive et nos volants auraient du sortir il y a longtemps mais pour les mêmes raisons on a eu du retard là dessus.

L’inflation, les taux d’intérêts semblent poser souci à d’autres marques, vous le ressentez aussi ?

Oui. Notre business principal c’est le refroidissement liquide et on est une entreprise listée (cotée en bourse) donc tout le monde peut lire nos rapports financiers. Nos revenus ont chuté de 40%. Donc oui, nous sommes massivement touchés. Et pour nous le marché SimSports, la vérité sur cette activité c’est que ce n’est pas encore un business c’est un investissement.

Mais c’est sûr on peut voir la différence dans les ventes par rapport au lancement de l’Invicta et maintenant
c’est deux mondes différents ! Donc évidemment on voit ça mais on peut aussi voir que les produits d’entrée de gamme et les marques entrée de gamme qui sont entrées sur le marché c’est eux qui vendent pour le moment.

Ca marche très bien, il y a par exemple, il y a Moza, Simagic, Fanatec qui sortent des produits d’entrée de gamme et je pense qu’ils font de très bonnes ventes en ce moment. Mais ça ne nous fait pas paniquer parce qu’on ne sera jamais les moins chers, ce n’est pas notre objectif.

On veut produire du haut de gamme à un prix disons, milieu de gamme. En tant qu’entreprise européenne on ne peut pas se battre avec les prix des entreprises chinoises parce que les couts sont très différents

On le sait, on a des bureaux en Chine ! Donc aussi longtemps qu’on aura des ingénieurs en Europe
et aux Etats Unis on sera incapables de se battre sur les prix. Ceci étant dit, je pense qu’on peut s’en rapprocher parce qu’on fait de la production de masse.

Et on innove sur la façon de penser le produit. Il y a eu beaucoup de gens qui ont regardé notre façon de faire et on dit « Vous utiilisez des capteurs Load Cell pas chers, ils faut des Load Cell à forte capacité ». Mais j’ai envie de dire… Je trouve ça stupide !

Stupide d’utiliser un capteur à 30$ quand on peut s’en sortir en utilisant un capteur à 5$ en gardant les bonnes caractéristiques. Donc évidemment on essaie de concevoir un design autour de ça pour être capables de vendre à des prix abordables, parce que bien entendu on pourrait mettre un capteur Load Cell à 30$ dedans mais là dessus il faut ajouter la marge du revendeur, il faut ajouter notre marge il faut ajouter la TVA donc ton capteur à 30$ pour le client c’est une hausse de 100$ sur le pédalier. Et je me demande pourquoi !

C’est quoi la touche Asetek ?

Je pense que c’est notre capacité à innover. Si on regarde nos pédaliers je pense qu’il y a plusieurs choses qu’on a fait plus intelligemment qu’au moins certains autres… Et en gardant en tête que c’est notre tout premier produit dans le monde de la simulation sportive ça me rend assez fier.

Je pense que quand on regarde… Nos volant par exemple ! Un volant est un volant c’est difficile, tu vas pas faire un volant triangulaire ! Donc le volant, d’après moi c’est une question de gouts… Fin, épais, grand, petit
10 boutons, 20 boutons, affichages ou pas…

Mais si on regarde notre base je pense qu’elles apportent quelques innovations. Quand on va lancer nos châssis aussi je pense qu’on va voir de nouvelles choses. Et même sur les freins, je sais qu’il y aura des surprises qui arriveront encore. Donc je pense que nos innovations mais aussi notre courage de faire les choses autrement.

Comme tu dois probablement le savoir, il y a un gros débat : est-ce qu’un frein doit être tendre
est-ce qu’il doit être dur, est-ce qu’il doit être long ou court. Et tu vois… On sait à quoi ressemble un ressenti de frein dans nos voitures de course, et là on en a deux différentes.

Alors bien sûr le frein n’est pas identique mais quand même, ils sont fermes, ils sont durs et relativement courts. Et grâce à l’amplitude de réglage de nos freins, on le réplique. On a lancé ce produit et on a été pas mal refoulés au départ, mais maintenant je vois des concurrents nous copier en disant « Maintenant on a un frein à deux phases ! » Ca me fait rire !

Et puis on a des milliers de clients maintenant qui nous donnent leurs retours et qui disent « Wahou, les deux premiers jours je n’aimais vraiment pas mais maintenant j’adore ! ». Ca je pense que c’est notre force.

Vous pensez que vous pouvez encore innover avec les bases Direct Drive ?

Oui, je crois. Il y a différents niveaux d’innovation. Logitech vient de sortir sa nouvelle base Direct Drive
et c’est peut être un très bon produit, je ne l’ai pas testé mais je le trouve très moche et très grossier, je sais pas ce qu’ils avaient en tête. Mais c’est une question de gouts !

Ils peuvent dire la même chose de nos produits, je m’en fiche. Mais si on regarde nos bases, c’est assez fin
avec un design assez joli. Tu as vu notre Quick Release, je pense qu’il est très innovant. Tu peux aimer ou pas les LEDs, mais on vient du monde du gaming et je pense que beaucoup de gens aiment les LEDs, même sur les pédales, et il y en aura sur nos châssis aussi.

Et ce qui est cool c’est que si tu n’aimes pas tu peux les éteindre mais si tu aimes et ne les a pas, tu ne peux pas les allumer.

Donc je pense qu’il y a beaucoup d’innovations comme ça. On a aussi le support frontal.
Tu l’as vu ? C’est complètement intégré, très propre.

Asetek Forte Wheel
Le volant Forte et ses LEDs

Et si on parle de l’idée originelle qui est de se sentir comme dans une voiture de course, je pense qu’il y a beaucoup de bases sur le marché qui font déjà du très bon boulot. Et c’est difficile de faire encore mieux
mais je pense que par exemple… notre partenariat avec Kévin Magnussen…

Y’a des tonnes de gens qui roulent sur simulateur, ils lancent Assetto Corsa et conduisent des F1
mais au final personne ne sait ce qu’on ressent dans une Formule 1. Je sais pas comment c’est ! Je n’en ai jamais piloté. Mais on est partenaires avec Kevin. Il a passé énormément de temps ici avec nos ingénieurs il disait « Là on doit changer ce réglage, là celui-ci parce que le ressenti doit être différent quand je touche le vibreur… ».

Et au final on va pouvoir sortir un paramétrage qui donne vraiment le ressenti de la véritable F1. D’ailleurs
ça ne sera peut être pas le réglage plus rapide pour les courses, mais c’est le feeling. Et tu pourras aller changer le réglage. « Ok là je vais faire une course donc je configure au plus rapide ». Mais si tu veux vraiment « simuler » une vraie voiture tu as le mode Magnussen.

D’ailleurs plus tôt j’ai parlé d’innovation comme de notre force, mais ça c’est aussi l’une des choses sur lesquelles j’insiste énormément : on veut se sentir comme dans une vraie voiture. Et c’est ça qu’on peut faire avec la base. Alors bien entendu, les autres peuvent aussi faire un partenariat avec un pilote de F1.

Mais tu vois, ça fait plus de 20 ans que le simracing est là, ne me demande pas pourquoi personne ne l’a fait avant nous ! Pour moi c’est aussi de l’innovation.

Je pense que pour nous, le marketing doit se traduire par de vraies fonctionnalités c’est ça qui apporte de la vraie valeur à l’utilisateur. Et c’est ça que j’aime à propos de Kevin parce que…

Je ne dis pas qu’on ne sortira jamais un produit « Edition Magnussen » avec sa signature ou un truc du genre. Mais ce qui l’intéresse vraiment c’est d’innover et de faire des choses qui donnent le même ressenti que la vraie voiture plutôt que juste coller son nom. Je pense que c’est une bonne chose.

La question que tout le monde pose tout le temps : Une idée du prix de la base Invicta ?

Oui, bien sûr je le connais !

Je le dirais comme ça… On a la base Forte et on a la base Invicta pour le moment. Le Forte aura 18Nm de couple le Invicta 27Nm. Elles partageront exactement les mêmes fonctionnalités. Même matériel, même qualité, même encodeur, même système de transmission électrique. Si ma mémoire est bonne, la Forte aura un peu moins de LEDs.

Mais pour le reste elles seront complètement identiques, et je pense que la base Forte, en tous cas au moment où on parle, sera la moins chère des bases sur le marché dans ce niveau de couple. Et l’Invicta sera pas loin au dessus.

Mais il y a encore une autre façon de le dire, c’est comme avec les pédales Invicta. Je pense que les gens sont parfois surpris d’avoir ce niveau de puissance et de qualité à ce niveau de prix et on n’est pas seulement là pour fournir un moteur industriel ! On livre une base avec un Quick Release, avec un bouton coupe couple, un bouton on/off déporté et notre modèle basique de montage fixe. Et après les gens peuvent acheter ce qu’ils veulent pour le fixer si ce qu’on donne ne leur convient pas.

Donc c’est un produit complet ! Et ça je pense que c’est quelque chose à garder en tête. Quand les gens comparent les prix entre les bases, ils regardent juste le moteur. Ils ne prennent pas en compte qu’après ça il faut acheter un support à 100$, parfois un coupe couple à 100$, et parfois même un Quick Release.

D’un seul coup tu as dépensé 300$ de plus dans ta base qui semblait avoir un prix raisonnable au départ mais arrivé à la caisse est bien plus chère !

Plus tard dans le futur on voudrait que les utilisateurs soient capables d’acheter un châssis complet chez nous avec tout dedans. Sauf l’ordinateur parce que on ne sait pas qui a un ordinateur, qui veut une console ou un PC nos clients sont des fabricants de PC. Crois moi Asetek n’a pas d’argent à faire en essayant de concurrencer Alienware par exemple.

Ils font un bien meilleur boulot sur ce point. Mais l’objectif c’est qu’en tant qu’utilisateur tu puisses mettre ça dans ton panier, un simulateur complet et tout est inclus. Et puis tu peux l’assembler toi-même ou tu peux avoir un de nos revendeurs qui l’assemble pour toi. On ne va pas les assembler nous même.

On va sortir nos châssis l’année prochaine et après ça j’espère aussi des sièges. Donc si on fait le point on aura les sièges, châssis, bases, pédales, volants, et on y est presque.

Dans le live Q/R vous avez parlé de boite de vitesse vintage, on peut en savoir plus ?

Je ne veux pas donner toutes nos idées à nos concurrents, si on le lançait demain je pourrais en parler. Mais oui, on sait que les gens aiment les véhicules et courses vintage et on comprend aussi que le simracing c’est un sport très matériel. J’adore le matériel moi-même, j’aime tout ce qui touche à la technologie. Et bien sûr utiliser un volant GT ou un volant Vintage, ça va pas te rendre plus rapide
mais on veut parler d’authenticité. Dans le simracing c’est fun si tu veux piloter une Ferrari ancienne
d’avoir un volant en bois et la boite de vitesse et les pédales etc. Donc on fera ça aussi éventuellement.

Est-ce que vous pensez sortir d’autres produits avec Pagani ou avec d’autres marques ?

Oui. Je dirais que pour le moment, vu l’état du marché, on est dans une année de dépression. Je pense que les produits haut de gamme très chers nous font du mal.

On peut le voir avec nos ventes, ce qui se vend et ce qui ne se vend pas. Ceci étant dit, je pense que ce qu’on a fait avec Pagani c’était génial.

Le pédalier Asetek SimSports Pagani Huayra R

Et oui, on veut lancer plus de produits avec eux et on aimerait aussi le faire avec d’autres marques. Je crois… Et ça n’a rien à voir avec le Simracing mais je crois que dans le futur, quand tu iras chez un concessionnaire…

Disons que tu ailles chez BMW, au Danemark on a les taxes les plus élevées au monde sur les voitures. Si tu veux une voiture à 100.000$ elle coute 300.000$ quand tu as fini de payer toutes les taxes. Et ça implique aussi que les concessionnaires n’ont pas de gros stocks.

Donc si tu vas chez un concessionnaire et que tu veux essayer une M2 ils pourraient sortir le simulateur, le programmer pour reproduire le ressenti d’une M2. Et puis tu veux essayer une M5 ou une M6 ou n’importe quoi et tu peux faire tout ça dans une simulation. Donc je pense que dans l’automobile en général les simulateurs vont prendre de plus en plus de place.

Comment vous pouvez sortir de votre zone de confort dans un secteur que vous dominez déjà en tant qu’entrepreneur ?

Je pense qu’une des bases c’est juste d’être confiant. Tu sais, y’a plein de gens qui m’écrivent « Tu ne sais pas de quoi tu parles, tu ne connais pas le monde de la course.. » Des choses comme ça. Mais moi j’ai confiance parce que oui je connais la course. Je suis aussi ingénieur, je suis aussi un créateur c’est mon boulot, je sais fabriquer moi-même. Et quand on avait notre équipe de F4 c’était moi l’ingénieur, je surveillais les données, faisait les réglages donc… Je comprends plutôt bien la course et je n’ai pas eu peur d’entrer sur ce marché.

Beaucoup des idées de produits viennent directement de moi en tant qu’entrepreneur. Et la plupart du temps ces idées viennent parce que je vois des choses que j’aimerais changer par rapport à nos concurrents. Il n’y a pas énormément de concurrents dans le monde du simulateur qu’on ait pas analysé
ou que je n’ai pas essayé, ou que je n’ai pas croisé sur une piste ou ailleurs. Et la plupart du temps les idées viennent du constat qu’ils font les choses de façon financièrement peu rationnelle.

On peut le faire moins cher ou plus intelligemment, ou mieux. Par exemple, quand tu verras nos châssis
Il y a beaucoup de possibilités d’ajustement qui normalement couteraient très cher à faire et en tant qu’entrepreneur en tant que personne, tu dois être prêt à prendre des risques si tu n’es pas prêt à prendre des risques, oublies.

J’ai un exemple : L’entreprise ne fonctionnait qu’au Danemark en 2005-2006. Et j’envoyais des emails sans arrêt aux gros fabricants de PC mais ça n’a jamais rien donné. C’était impossible de rester au Danemark et de bosser avec Dell au Texas. Donc je me suis dit qu’on devait être aux USA.

Alors j’ai déménagé aux Etats Unis et ouvert nos bureaux là-bas pour être plus proche de nos clients
mais on avait pas d’argent ! Ma femme et moi on est parti ensemble avec nos deux enfants et il y avait assez d’argent dans les caisses d’Asetek pour tenir quelques mois. Donc mon boulot c’était de me rapprocher des clients, ouvrir les bureaux américains et lever des fonds.

Et si je n’arrivais pas à lever les fonds, il n’y aurait même pas de quoi acheter les billets d’avion pour rentrer. Et je pense que beaucoup de gens n’auraient eu les tripes pour faire ça. Mais on se disait que c’était une aventure. C’est juste de l’argent et si ça tourne mal, oui on aura perdu de l’argent et alors ? On recommencera ! Maintenant, les années ont passé et on voit que ça a marché donc je dirais juste fonce !

Asetek = André Sloth Eriksen Technologies ?

Oui ! En fait au Danemark il y a plus de 20 ans ce n’était pas populaire d’être entrepreneur, les gens vous prenaient pour un fou si vous vouliez lancer votre entreprise. Donc j’avais un boulot dans l’entreprise Danfoss qui est l’une des plus grosses, enfin probablement la plus grosse entreprise industrielle danoise
dans leur programme de stage en gestion donc j’avais une carrière de management dans une entreprise mondiale dans laquelle j’aurais pu grimper.

Et je pensais que je voulais ça ! Et puis j’ai fondé Asetek parce que j’avais cette idée de système de refroidissement par compresseur. C’était le projet Vapochill. Mais pour être en mesure d’acheter les pièces dont j’avais besoin il fallait que je crée une entreprise. Parce qu’en tant que particulier je ne pouvais pas acheter des compresseurs de réfrigérateurs. Donc il fallait que je crée une entreprise alors j’ai fait une petite entreprise privée juste pour pouvoir acheter les compresseurs et faire mon hobby. Je ne voyais pas ça du tout comme un business ou une future carrière, mais ça a décollé, les ventes ont grimpé et au bout d’un moment ça n’avait pas de sens de changer le nom de l’entreprise. Mais c’est bien André Sloth Eriksen Technologies. J’y ai pas pensé plus que ça, c’était pas très malin, mais voilà c’est comme ça.

Merci André Eriksen, et merci à l’équipe !

Un grand merci à André Eriksen pour le temps précieux qu’il nous a consacré. Mais aussi à toute l’équipe Asetek qui nous a fait vivre une journée passionnante dans leur QG.

A voir : On visite l’usine Asetek et on test le châssis de Kévin Magnussen

Il est d’ailleurs très probable qu’on ait à nouveau l’occasion d’avoir André derrière notre objectif.
Vous avez des questions que vous aimeriez qu’on lui pose ?
Ecrivez les dans les commentaires !
On se fera une joie d’en intégrer autant que possible lors de notre prochaine rencontre 🙂
2 Commentaires
  1. Bonjour Sam et Flo,
    Est ce que vous savez quand un écosystème Asetek sera porté sur PS5 ?
    Merci, Bonne continuation.
    Meryll

    • Bonjour 🙂 Aucune idée pour le moment. C’est un processus très long avec plusieurs commissions à passer et extrêmement coûteux. En plus de ça les marques déjà compatibles consoles doivent évidemment faire tout ce qu’elles peuvent pour éviter que de nouveaux concurrents puissent passer les commissions ^^ Bref, on a le temps de voir venir !

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